La pythie face à l’Histoire. Mémoire, mythes et spiritualité dans la poésie d’Eeva-Liisa Manner et Anna Akhmatova
La soutenance de thèse de David Paigneau aura lieu le mercredi 11 décembre à 13 h à la Maison des Langues et de l’International, salle LI 160, Université de Caen Basse-Normandie.
Résumé
Au cours de ce projet de thèse, deux poétesses du XXème siècle : Eeva-LiisaManner et Anna Akhmatova, seront mises en parallèle pour leurs choix esthétiques, mais aussi pour leur parcours et pour leur position singulière, au sommet de la pyramide poétique de leurs nations respectives, et en porte-à-faux face à certains présupposés du modernisme littéraire et intellectuel qui les entoure, alors même que l’une et l’autre ont débuté leur carrière au sein ou aux côtés de courants poétiques dits modernistes, avant de s’en émanciper et de développer une voix poétique solitaire et à l’écart des courants institutionnalisés. L’un des hiatus qui les éloignentde la modernité poétique et intellectuelle est la question spirituelle – religieuse . La poésie de Manner et celle d’Akhmatova tendent à transmettre une mémoire qui se veut à la fois intime et collective, par le biais de poèmes mêlant autobiographie et références constantes aux grands classiques de la littérature et surtout aux différentes pensées religieuses, ou plutôt à « la » pensée religieuse aux sources de toute foi, selon la thèse de l’homo religiosus.Ainsi, relectures de mythes (Loth et figures de Dante pour Akhmatova, Ulysse ou Orphée pour Manner), citations de textes sacrés, apparitions et prises de parole symboliques de prophètes, foisonnent dans les poèmes des deux auteurs. Mais si la pensée religieuse permet de rapprocher Manner et Akhmatova, c’est qu’elle ne traverse pas les poèmes uniquement en tant que choix esthétique, mais en tant que système de pensée à part entière. Poétesses mêlant vie, œuvre et histoire, leurs visions du monde respectives sont structurées autour de préoccupations communes : s’inscrire dans la culture universelle, transmettre des valeurs humaines que la guerre et/ou les troubles politiques ont bafouées, enfin revendiquer l’apport de la spiritualité et de l’héritage religieux dans le jugement critique porté sur le monde. Il s’agira donc avant tout d’une thèse de littérature comparée, mais qui accordera une place de premier choix à la biographie des deux auteurs, à leur parcours, à leur statut dans la littérature de leurs pays respectifs, et qui s’ouvrira à l’histoire des idées en replaçant la vie et l’œuvre de Manner et d’Akhmatova dans le contexte des débats intellectuels du XXème consacrés à la question spirituelle-religieuse.